AccueilLe Gen Z Lab« Nous ne voulons pas enrichir un secteur qui vit de la destruction de la planète » : quand la fronde étudiante contre les énergies fossiles se densifie

« Nous ne voulons pas enrichir un secteur qui vit de la destruction de la planète » : quand la fronde étudiante contre les énergies fossiles se densifie

  • vendredi 17 novembre 2023
  • Edmée Citroën

Dans une nouvelle vidéo, des étudiants réaffirment leur volonté de ne pas servir des entreprises jugées climaticides. La contestation s’amplifie vis-à-vis des organisations allant à l’encontre de l'écologie, et ce depuis plus de 10 ans.

Ils sont étudiant.e.s à l’école des Ponts et Chaussées, aux Mines, à Centrale Supélec, HEC, Télécom, Sciences Po, ou encore Agro Paris Tech. Dans le sillon des bifurqueurs, une quinzaine de jeunes des secteurs de l’ingénierie et du commerce ont réaffirmés leur volonté de “ne pas travailler pour des entreprises qui continuent d’investir dans les industries fossiles”.

En ligne de mire, le géant pétrolier TotalEnergies “qui continue de creuser de nouveaux puits de pétrole ignorant les appels de la communauté scientifique” affirment-ils en référence au mégaprojet d’oléoduc en Tanzanie et Ouganda porté par le groupe, dans une vidéo notamment relayée sur Linkedin.

Devenu emblématique du choix controversé de TotalEnergies de poursuivre ses investissements dans les énergies fossiles, EACOP (East African Crude Oil Pipeline) est un gigantesque projet d'oléoduc et de forages pétroliers mené en Afrique de l’Est.


Issus de diverses grandes écoles françaises, les étudiants appellent les actionnaires et notamment le principal Amundi, à s’opposer au projet. “Nos études ne leurs serviront pas à détruire notre planète. Notre planète comme nos emplois ne sont pas à vendre” concluent-ils. 

Mise en péril des zones riches en biodiversité, populations expropriées sans être indemnisées ou empêchées de cultiver leurs terres, ce mégaprojet suscite des protestations internationales et notamment des associations environnementales, selon qui il est mené au mépris des droits humains et de l'environnement.


Alors que 60% des jeunes donneraient la priorité à un travail qui a un impact sur la société ou l’environnement plutôt qu’à un salaire élevé; les actions militantes d’étudiants contre les entreprises jugées climaticides se multiplient sur les campus, lors des remises de diplômes ou des forums de recrutement. Phénomène isolé ou désertion massive, face au recul des étudiants vis-à-vis du groupe pétrolier, TotalEnergies affirme maintenir son attractivité auprès des jeunes talents, avec 170 à 180 candidatures reçues pour chaque annonce de CDI publiée.


Tendre vers un modèle décroissant

Au delà de la campagne #StopEacop, ces étudiants - qui se revendiquent “éco-furieux” - plaident pour un modèle décroissant et une bifurcation économique. Ils prônent une “autre manière de produire, de consommer et de jeter” et fustigent les stratégies de greenwashing portées selon eux par les politiques RSE des organisations.

Ils proposent notamment de renforcer le pouvoir de la RSE, aujourd’hui périphérique dans les entreprises afin de mettre ces politiques au service des unités de production et non pas de communication. Enfin, ils souhaitent aussi intégrer un nouvel indicateur de richesse prenant en compte le coût écologique et social des entreprises : “la comptabilité écologique doit faire fusionner les valeurs financière et non-financière de l’entreprise pour former une valeur finale qui sera la valeur de l’entreprise. Les organisations ont aujourd’hui une dette envers la nature, elles prélèvent beaucoup trop et rendent beaucoup moins” affirme Louis Fidel, co-fondateur d’HEC Transition, étudiant et militant.


Les mobilisations étudiantes contre les énergies fossiles s’intensifient depuis 10 ans

Baptisée #StopEACOP, cette campagne de contestation s’inscrit dans le sillon du militantisme écologique étudiant. En 2011, se lançait la campagne Fossil Free visant à inciter les institutions financières à retirer leurs investissements dans les combustibles fossiles.

Autre célèbre mouvement, la campagne Divest Harvard, lancée en 2012 : elle visait à inciter l'université américaine à retirer ses investissements dans les énergies fossiles. Les nombreux sit-ins et manifestations sur le campus ont finalement poussé Harvard à retirer ses investissements dans les entreprises de charbon.

Enfin en 2016, des étudiants de Stanford ont mené une occupation de l'administration universitaire pour exiger le retrait des investissements de l'université dans les énergies fossiles.

Les mobilisations étudiantes ont également été marquées par des actions de désobéissance civile bloquant l'accès aux sites de production des énergies fossiles ou empêchant la construction de nouvelles infrastructures.

Ces actions ont toutes contribué à sensibiliser le public à la crise climatique et à faire pression sur les entreprises et les gouvernements pour qu'ils prennent des mesures plus ambitieuses pour lutter contre le changement climatique.